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SEQUENCE LE THEATRE DU XVIIEME AU XXIEME SIECLE.
PREPARATION DE L'ECRIT: CONTRACTION DE TEXTE.
Beaumarchais, Préface de La Folle Journée ou le Mariage de Figaro
Vous proposerez une contraction de ce texte en 275 mots environ (t 10% autorisé : solt
entre 247 et 302 mots)
J'ai pensé, je pense encore, qu'on n'obtient ni grand pathétique, ni profonde moralité, ni
bon et vrai comique au théâtre, sans des situations fortes, et qui naissent toujours d'une
disconvenance sociale, dans le sujet qu'on veut traiter. L'auteur tragique, hardi dans ses
moyens, ose admettre le crime atroce : les conspirations, l'usurpation du trône, le meurtre,
5 l'empoisonnement, l'inceste, dans Edipe et Phèdre; le fratricide, dans Vendôme; le
parricide, dans Mahomet; le régicide, dans Macbeth, etc., etc. La comédie, moins
audacieuse, n'excède pas les disconvenances, parce que ses tableaux sont tirés de nos
mours; ses sujets, de la société. Mais comment frapper sur l'avarice, à moins de mettre en
scène un méprisable avare ? démasquer l'hypocrisie, sans montrer, comme Orgon, dans
le Tartuffe, un abominable hypocrite, épousant sa fille et convoitant sa femme ? un homme
à bonnes fortunes, sans le faire parcourir un cercle entier de femmes galantes ? un joueur
effréné, sans l'envelopper de fripons, s'il ne l'est pas déjà lui-même ?
Tous ces gens-là sont loin d'être vertueux; l'auteur ne les donne pas pour tels: il n'est le
patron d'aucun d'eux, il est le peintre de leurs vices. Et parce que le lion est féroce, le loup
AS vorace et glouton, le renard rusé, cauteleux, la fable est-elle sans moralité ? Quand l'auteur
la dirige contre un sot que la louange enivre, il fait choir du bec du corbeau le fromage dans
la gueule du renard, sa moralité est remplie; s'il la tournait contre le bas flatteur, il finirait
son apologue ainsi : Le renard s'en saisit, le dévore; mais le fromage était empoisonné. La
fable est une comédie légère, et toute comédie n'est qu'un long apologue: leur différence
2 est que dans la fable les animaux ont de l'esprit, et que, dans notre comédie, les hommes
sont souvent des bêtes, et, qui pis est, des bêtes méchantes.
Ainsi, lorsque Molière, qui fut si tourmenté par les sots, donne à l'Avare un fils prodigue et
vicieux qui lui vole sa cassette et l'injurie en face, est-ce des vertus ou des vices qu'il tire sa
moralité ? Que lui importent ces fantômes ? c'est vous qu'il entend corriger. Il est vrai que
les afficheurs et balayeurs littéraires de son temps ne manquèrent pas d'apprendre au bon
public combien tout cela était horrible I Il est aussi prouvé que des envieux très importants,
ou des importants très envieux, se déchaînèrent contre lul. Voyez le sévère Boileau, dans son
épître au grand Racine, venger son ami qui n'est plus, en rappelant ainsi les faits:
L'ignoranceet l'erreur, à ses naissantespièces,
Enhabits de marquis, en robes de comtesses,
Venaient pour diffamer son chef-d'œuvre nouveau,
Et secoualent la tête à l'endroit le plus beau.
Le commandeur voulait la scène la plus exacte;
Le vicomte, indigné, sortait au second acte:
35 L'un,défenseur zélé des dévots mis en jeu,
Pour prix de ses bons mots le condamnait au feu ;
L'autre, fougueux marquis, lui déclarant la guerre,
Voulait venger la cour, immolée au parterre.