Ecoute tant la comprendre. La vie est difficile pour elle. A elles deux, elles vous ont élevés, ton frece at tot, et elles ont fait de vous les bons garçons que vous êtes. Alors elle pour, c'est force il faudra t'aider encore un peu malgré la bourse, et en tout cas tu ne rapporteras pas d'argent pendant six ans à la maison. To la comprends? Jacques secoua la tete de har en haut sans regarder son mattre. Bon, mais peut-être on peut lui expliquer. Poends ton cartable, je viens avec toi! A la maison ? dit Jacques. Mais oui, ça me fera plaisir de revoir ta mère.

Un moment après, M. Bernard, sous les yeux interdits de Jacques, frappait à la porte de sa maison. La grand-mere vint ouvrir en s'essuyant les mains avec son tablier dont le cordon trop serré falsait rebondir son ventze de vieille femme. Quand elle vit l'instituteur, elle eut sun geate vers ses cheveux pour les peigner. Alors, la mémé, dit M. Bernard, en plein travail comme d'habitude. Ah! vous avez du mérite. La grand-mère faisait entrer le visiteur dans la chambre, qu'il fallait traverser pour aller dans la salle à manger, l'installait près de la table, sortait des verres et de l'anisette. Ne vous dérangez pas, je suis venu faire un bout de conversation avec vous. Pour commencer, il l'interrogea sur ses enfants, puis sur sa vie à la ferme, sur son mari, il parla de ses propres enfants. À ce moment Catherine Cormery entra, 'affola, appela M. Bernard Monsieur le Maître et repartit dans sa chambre se peigner et mettre un tablier frais, et vint s'installer sur un bout de chaise un peu à l'écart de la table. Toi, dir M. Bernard à Jacques, va voir dans la rue si j'y suis. Vous comprenez, dit-il à la grand- mère, je vais dire du bien de lui et il est capable de croire que c'est la vérité... Jacques sortit, dévala les escaliers et se posta sur le pas de la porte d'entrée. Il y était encore une heure plus tard, et la rue s'animait déjà, le ciel à travers les ficus virait au vert, quand M. Bernard surgit dans son dos. Il lui grattait la tête. Eh bien! dit-il, c'est entendu. Ta grand-mère est une brave femme. Quant à ta mère... Ah! dit-il, ne l'oublie jamais. Monsieur, dit soudain la grand-mère qui surgissait du couloir. Elle tenait son tablier d'une main et essuyait ses yeux. J'ai oubliée... vous m'avez dit que vous donneriez des leçons supplémentaires à Jacques.- Bien sûr, dit M. Bernard. Et il ne va pas s'amuser croyez-moi. Mais nous ne pourrons pas vous payer. M. Bernard la regardait attentivement. Il tenait Jacques par les épaules. « Ne vous en faites pas», et il secouait Jacques, il m'a déjà payé».

Albert Camus, Le Premier Homme, Gallimard, 1994.

1 Elles deux la grand-mère et la mère de Jacques. 2. Anisette apéritif à base d'anis. Catherine Cormery la mère de Jacques. Ficus, n. m. arbre d'origine tropicale.

1)Quel verbe du premier paragraphe justifie la démarche de l'instituteur auprès de la grand-mare et de la mère de Jacques ?

2)En répétant: il faut la comprendre», «Tu la comprends?» (L1 et 4). quels sentiments M. Bernard veut-il éviter chez Jacques à l'égard de sa grand-mère ?

3)a. Pourquoi M. Bernard n'aborde-t-il pas immédiatement le sujet pour lequel il est venu voir La grand-mère et la mère de Jacques?

b. À partir de quel moment aborde-t-il le sujet ?

4)<< essuyait ses yeux >> (L. 25)
Comment interprétez-vous les larmes de la grand-mère à la fin du texte ?

5)Quels sont les deux temps principaux utilisés pour le récit? Fiches 19 et 20 Justifiez l'emploi de chacun d'eux.

6)<«les yeux interdits de Jacques » (L 8); << un tablier frais » (L 18).
a. Remplacez, dans ces expressions, les mots interdits et frais par des synonymes.

b. Employez chacun de ces mots dans une phrase avec un sens différent de celui du texte.

7)Réécrivez depuis << Jacques sortit...», jusqu'à « ... grattait la tête » (L. 20 à 23), en remplaçant le Jacques par le pronom personnel Je. Vous effectuerez les changements nécessaires.